Ne plus être obligé de renoncer à son chien ou à son chat pour entrer dans une maison de retraite sera bientôt possible. Une loi vient d’être votée pour le permettre. Mais sera-t-elle appliquée ? Thésy a mené l’enquête.
Par Thésy Bionnier
La loi « bien vieillir » votée le 8 avril et promulguée le 9 avril prévoit des changements et garantit entre autres le droit d’accueillir un animal de compagnie dans un Ehpad. Une bonne nouvelle pour les personnes qui s’apprêtent à intégrer un Ehpad. La présence d’animaux y est une telle source de réconfort. « C’est du bonheur : je ne suis pas toute seule, je suis avec ma fifille », « si notre chien n’avait pas été accepté, nous ne serions pas venus » tels sont quelques-uns des messages recueillis par la directrice d’une résidence pour personnes âgées à Guingamp, en Bretagne qui n’a pas attendu cette loi pour accueillir les animaux des résidents qui en font la demande. Depuis 2016, elle a ouvert les portes à un chien, un lapin et neuf chats. « Au fil des années, tous ces animaux de compagnie sont devenus ceux de la résidence. L’espérance de vie en résidence étant en moyenne de quatre ans et demi » raconte-t-elle. Avant de préciser que « l’entretien de ces animaux nécessite un effort qui n’est pas insupportable pour les gestionnaires ».
Cependant, cette loi est à nuancer, car elle laisse le droit aux directeurs d’Ehpad de s’opposer à la présence d’animaux de compagnie au prétexte qu’ils pourraient poser des risques sanitaires (allergies, hygiène, chutes et morsures), et venir perturber l’organisation des services. Si tel résident ne peut plus s’occuper lui-même de son chat, c’est au personnel que reviendra son entretient. Et s’il décède, ce sera à l’Ehpad d’assumer les frais de nourriture et de vétérinaire. Une charge qui peut paraître superflue sachant qu’actuellement beaucoup d’établissements souffrent de problèmes financiers et de pénurie de personnel.
Pour faire plaisir à leurs résidents, certaines directions ont choisi d’acquérir un ou deux chats qui appartiennent à l’ensemble de la communauté et font le bonheur de tous. C’est le cas à Caen, à la résidence Soleil Emera. A Rouen, la directrice d’une résidence possède un gros chien qui se promène en toute liberté. Selon moi, qui suis une ancienne directrice d’Ehpad, c’est dangereux car l’animal pourrait provoquer des chutes mais la responsable en prend le risque pour faire plaisir. A Sotteville, à la résidence Saint-Joseph, tout en reconnaissant combien les résidents seraient heureux d’être hébergés avec leur animal, la direction refuse de les accueillir pour des raisons, tout d’abord de santé (risque d’allergies), d’hygiène et surtout, par impossibilité d’imposer une charge supplémentaire au personnel, sans oublier le coût. Par contre, la direction a choisi une autre méthode pour faire plaisir aux pensionnaires : elle a acheté des chats en peluche doux à caresser et donnant l’illusion d’être vivants puisqu’ils bougent et imitent les miaulements. Ils sont très prisés et passent de mains en mains, certains résidents nouant de véritables relations avec eux. Ainsi cette dame qui réveille son chat le matin, cette autre qui se réjouit qu’il soit réveillé ou encore celle-ci qui sort pour lui faire prendre l’air. Bref, si chacun reconnait que cette loi est un plus pour les personnes âgées, dans les circonstances actuelles où la vie des Ehpad est si difficile, elle sera, je le crains, peu appliquée.
Dans l’établissement de long séjour que je dirigeais, le médecin chef n’aurait pas accepté que les résidents viennent avec leurs animaux, et moi non plus, vu leur état de dépendance très important. Cependant, l’établissement ayant gagné le prix « merci » et à la clé une belle somme d’argent, le personnel avait souhaité qu’il se dote d’un aquarium. Ce fut fait et il a été installé dans le hall d’entrée. Comme il se voyait de tous les étages, nous avons constaté que des pensionnaires qui, jusque-là, refusaient de descendre dans le hall, venaient observer les poissons et restaient longtemps à les regarder. Cela paraissait les apaiser. Mais l’entretien d’un aquarium coûte cher surtout si, faute de personnel connaisseur, il faut faire appel à un spécialiste extérieur. Une année partant en vacances, j’ai demandé à l’ergothérapeute, si je pouvais lui confier mes oiseaux, pensant que cela ferait plaisir aux résidents. L’effet a été au-delà de mes espérances. La présence de mes oiseaux les a rendus tellement heureux, que je n’ai jamais pu les récupérer. Ils sont restés en pension définitivement !