16 avril – 31ème jour du confinement. La presse annonce la mort aujourd’hui de l’écrivain chilien Luis Sepulveda (pas trouvé sur mon clavier trop français le « u » accent aigu qui pourtant caractérise bien son nom), décédé à 70 ans du Covid 19, à Oviedo dans le nord de l’Espagne où il habitait.
Si j’ai beaucoup lu Garcia Marquez dans ma jeunesse, je n’ai entendu parler et découvert Luis Sepulveda que très, trop tardivement.
Dans les années 1973-1974, j’accédais à la majorité, toute neuve majorité à 18 ans ! Ces années-là j’étais très sensibilisée à ce qui se passait en Amérique Latine. Mon professeur préféré était parti enseigner en Argentine, à Buenos Aires, où le climat tournait déjà vinaigre ; nous suivions terrifiés le coup d’État de Pinochet au Chili, l’emprisonnement, l’assassinat des militants de l’Unité Populaire, des partisans d’Allende. J’écoutais en pleurant Julos Beaucarne chanter dans « Lettre à Kissinger » le calvaire du guitariste Victor Jara dont les militaires avaient coupé les doigts avant de l’assassiner. Mais de Luis Sepulveda, que nenni, jamais entendu parler, ni de son emprisonnement, ni du travail d’Amnesty International pour le faire libérer, ni non plus de son départ en exil pour ne plus jamais remettre les pieds au Chili.
Ce n’est qu’en juillet 2012 que j’ai rencontré Sepulveda, pas lui en personne bien sûr, mais une de ses œuvres. C’était à l’occasion d’une de ces rencontres fabuleuses que l’on peut faire au festival d’Avignon dans le cadre du « off ». Un comédien d’une petite compagnie, seul en scène, interprétait avec brio tous les personnages du « Neveu d’Amérique ». Une belle performance pleine d’humour, de grâce, d’émotion… J’ai oublié le nom de l’acteur, de la compagnie de théâtre mais j’ai gardé au cœur ce magnifique texte et le nom de son auteur.
Depuis lors, chaque fois que je vais traîner dans les bouquineries, j’achète tous les livres de Sepulveda ce qui me tombent sous la main. J’ai ainsi lu dans le désordre « Le monde du bout du monde », « Le journal d’un tueur sentimental », « L’ombre de ce que nous avons été » et « Rendez-vous d’amour dans un pays en guerre ». A chaque fois, c’est un univers bien particulier, bien reconnaissable, comme une petite musique que je retrouve avec bonheur. Je n’ai en revanche jamais lu l’ouvrage qui fut, si
j’en crois les articles de presse, son plus grand succès « Le vieux qui lisait des romans d’amour ».
Promis, je le chercherai lorsque je pourrai sortir de mon confinement.
C’était aujourd’hui « petite chronique d’une disparition qui me peine ». Puisse-t-elle donner à d’autres l’envie de lire et d’aimer Sepulveda.
Martine Lelait – 17 avril 2020