Comment diminuer les dépenses publiques ? Le gouvernement de Michel Barnier a eu une idée aux dépens des fonctionnaires qui a fait bondir Martine…qui du coup en a eu une autre.
Par Martine Lelait.
Dans l’immense jeu de recherches d’économies dans lequel s’est lancé le gouvernement de Michel Barnier en octobre dernier, il a été proposé un alignement des jours de carence pour maladie des fonctionnaires sur le régime du privé. Actuellement, les fonctionnaires ont une journée de carence imposée en cas de maladie, c’est-à-dire une journée sans rémunération quand les salariés du privé en ont trois.
Les raisons de cette proposition ? Réduire le taux d’absentéisme qui aurait explosé dans la fonction publique. Et par la même occasion, ramener le salaire des fonctionnaires de 100 % à 90 % en cas de maladie. La mesure serait susceptible de faire économiser quelque 1,2 milliard d’euros.
Mais est-ce qu’on résoudra l’absentéisme de cette façon ? S’est-on demandé pourquoi les fonctionnaires se mettaient en arrêt maladie avant de les soupçonner de fainéantise ?
Pas besoin, à mon sens, de longues réflexions pour en trouver les raisons… Tout d’abord, il faut évoquer l’épuisement psychologique. Cela a été démontré par plusieurs études, l’épisode du Covid a laissé des traces. Notamment chez les professionnels de santé qui se sont dévoués corps et âme pendant cette crise sanitaire et s’y sont épuisés. Du côté des enseignants, leur métier ne se cesse de se complexifier et chez certains, les assassinats de deux professeurs ont eu un impact sur leur santé psychique.
Pour bien connaître par ailleurs certaines administrations, je sais combien, d’une part les réductions de postes dans certains services, où les dossiers à traiter s’accumulent avec retard, et d’autre part, les méthodes de management parfois brutales, emmènent certains fonctionnaires aux limites du burn-out. Aurait-on oublié les risques psychosociaux dans la foulée des recherches d’économies ?
Autre raison qui pèse vraisemblablement sur l’absentéisme, que ce soit d’ailleurs dans la fonction publique ou dans le privé : le report de l’âge de la retraite qui contribue à ce que les salariés soient de plus en plus âgés. Or, comme on le sait, les problèmes de santé ont tendance à croître avec l’âge.
Il n’est pas difficile d’imaginer que pour ne pas perdre deux jours de salaire, les fonctionnaires refuseront désormais les arrêts de travail courts prescrits par leur médecin, au risque de basculer ensuite sur des arrêts longs en raison de situations de santé de plus en plus dégradées. Qui sortira gagnant dans l’affaire ?
Cocasserie de l’actualité : deux jours après l’annonce de cette mesure sur les journées de carence des fonctionnaires, on apprenait que Michel Barnier, alors Premier Ministre, avait été opéré pendant le week-end d’une lésion cervicale et qu’il avait repris ses fonctions dès le lundi suivant à Matignon. Lui, au moins, ai-je ironisé, n’est pas une chochotte comme tous ces fonctionnaires qui se font arrêter pour un oui ou pour un non. Il utilise son week-end pour se faire opérer et il ne se fait même pas arrêter. Prenez-en de la graine, semblait nous dire le Premier Ministre. Inspirez-vous de ce bel exemple qui vient d’en-haut.
Pour la recherche d’économies, je suggère de continuer à chercher vers le haut plutôt que du côté des catégories socio-professionnelles les plus modestes.