De la démission d’une élue politique à un âge de départ en retraite bientôt plus élevé, en passant par le bénévolat…. Réflexions en vrac d’une retraitée, qui s’inquiète pour l’avenir de la démocratie et de la citoyenneté.
Par Martine Lelait
Nous sommes nombreux actuellement à louer comme une belle leçon de démocratie, la sagesse de Jacinda Ardern, première ministre néozélandaise qui a décidé de démissionner de son poste pour cause de fatigue et de manque d’énergie. Le 20 janvier, dans son billet quotidien au journal Libération, le journaliste Thomas Legrand exprimait que cette attitude était le signe d’une force démocratique qui aurait valeur d’exemple et mérite notre respect. Assurément.
Je ne peux m’empêcher de mettre en parallèle une autre information concernant la démission de nombreux maires, après seulement deux années de mandat. La Gazette des Communes notait en effet récemment que plus de 900 maires avaient démissionné depuis leur élection en septembre 2020, chiffre bien sûr à relativiser quand on sait qu’il y a près de 35000 communes en France. Mais, on constate aujourd’hui autant de démissions en deux ans que pendant les quatre années du précédent mandat. Ces démissions ont différentes causes : le respect de la règle de non cumul de mandats peut amener certains à abandonner celui de maire ; mais considérant que les trois quarts des communes ont moins de 1500 habitants, que les nouveaux maires élus en 2020 sont plus jeunes, encore en activité, on peut comprendre que le cumul de leur mandat électif et de leur activité professionnelle soit difficile au quotidien. Le maire porte en effet de lourdes responsabilités, il est, comme on dit parfois ,« le premier à portée de baffes », certains ont même connu de véritables menaces voire des agressions ; il leur est par ailleurs demandé de maîtriser de plus en plus de réglementations techniques et complexes, et être capables de réelles compétences de gestionnaires. Que la fatigue et le découragement les gagnent est à mon sens compréhensible. Certains parlent même de crise de vocations politiques bénévoles.
De fil en aiguille, cette réflexion m’en amène encore une autre : cette crise de vocations bénévoles, on la connaît déjà dans les milieux associatifs. Les conseils d’administration (ceux que je fréquente en tous cas) se composent la plupart du temps de retraités actifs mais il est souvent difficile pour ceux qui y exercent des responsabilités importantes, sur des postes de président(e), de trésorier(e), de secrétaire, de trouver des successeurs lorsqu’ils n’envisagent plus de poursuivre. Les forces vives se trouvent en effet le plus souvent chez les jeunes retraités encore plein d’énergie pour s’investir activement dans le bénévolat. D’où une autre réflexion encore : si demain l’âge de la retraite est repoussé, qu’en sera-t-il de l’énergie qui restera aux retraités pour s’investir dans des mandats électifs, dans des associations ? Comme l’emploi des seniors reste malheureusement un vœu pieux, le report de l’âge de la retraite fera selon moi, de plus nombreux bénéficiaires des minima sociaux (de l’allocation de solidarité spécifique du Pôle Emploi ou du RSA), avant de pouvoir percevoir leur retraite. Et lorsque l’âge de la retraite sera enfin venu, qui voudra, qui pourra encore, qui aura la santé et l’énergie pour s’investir dans un mandat de maire, de conseiller municipal, de président, de trésorier ou même d’administrateur d’association ? Le gouvernement ferait bien de ne pas perdre cela de vue : il y va de l’avenir de la démocratie et de la citoyenneté.