Première chanson de notre série « Ma Chanson d’un été ».
Dans l’été 1971 de Martine qui l’a passé au cœur du Pays de Caux, la chanson de Joan Baez a tourné en boucle.
Par Martine Lelait
Été 1971, l’année de mes encore 14 ans, les 15 restaient à venir à l’automne.
Un été charnière, je venais de quitter le collège et allais entrer au lycée en septembre et c’est pendant cette classe de seconde que j’allais ouvrir mes ailes et enfin grandir.
Bref, à l’été 1971 j’étais encore très gamine. Pour me féliciter de l’obtention du BEPC, mes parents m’avaient offert un petit magnétophone à bande, bien mieux qu’à cassettes ; cet appareil avait été l’objet de tous mes espoirs, de toutes mes attentes et devenait celui de toutes mes attentions.
Je passais mes vacances à la campagne chez mes grands-parents en plein cœur du Pays de Caux ; je ne m’y ennuyais nullement, cela viendrait les étés suivants. J’y séjournais soit avec ma sœur, soit avec une cousine. Nous nous gavions des Jours de France, des Point de vue – Images du monde que ma grand-mère rapportait de chez sa coiffeuse, et surtout des romans-photos de Nous Deux, autant de magazines que nous ne trouvions pas à la maison. Nous regardions aussi les dessins un peu salaces du Hérisson. Comme ces lectures nous étaient plutôt interdites, je trouvais cela merveilleusement sulfureux.
Je trimballais partout mon petit magnétophone et j’enregistrais à tour de bras, mes grands-parents qui chantaient, les rires de mon petit frère quand on le chatouillait, les génériques des feuilletons télévisés que j’aimais ainsi que des chansons entendues à la radio.
Cet été-là, c’est Here’s to you chantée par la voix cristalline de Joan Baez que j’écoutais en boucle. La chanson venait de sortir, elle était devenue un grand succès sur une musique d’Ennio Morricone pour le film Sacco et Vanzetti, film que je n’avais pas vu parce que je n’allais pas à au cinéma à cette époque. Je ne suis pas sûre non plus d’avoir entendu parler cet été-là de l’histoire de ces deux anarchistes italiens dont il était question.
Mais, suprême bonheur, même si mon anglais était très scolaire, déchiffré à l’écrit mais très mal baragouiné, le texte en était archi simple : quatre mêmes vers se répétaient tout au long de la chanson. Quelle chance ! Je pouvais les chanter à tue-tête sans trop de risque de me tromper.
Here’s to you, Nicola and Bart,
Rest forever here in our hearts,
The last and final moment is yours,
That agony is your triumph.
Mon triomphe en anglais à moi de cet été- là !