L’écho des Jeux Paralympiques est encore présent dans tous les esprits. Il a incité les résidents de la résidence Trianon à parler de la place du handicap dans notre société et d’aborder la notion du dépassement de soi-même au quotidien.
Revue de presse à la résidence autonomie du Trianon à Rouen.
Étaient présents : Brigitte, Christine, Daniel, Danielle, Jean, Marie-Claude, Moustafa, Odette, Odile, Patrick, Pierre, Thierry et Helena, animatrice.
Pierre : Les Jeux Olympiques et Paralympiques ont remporté un grand succès. La télévision a largement diffusé les images de ces deux évènements. Les Jeux Paralympiques ont généré une prise de conscience dans le pays, le regard que l’on porte sur le handicap va changer durablement.
Marie Claude : Je n’en suis pas certaine, je pense qu’il faudra plusieurs olympiades pour faire bouger les mentalités. Dans l’immédiat, le soufflé va retomber.
Cela ne m’empêche pas d’avoir énormément apprécié les compétitions. J’ai pu réaliser à quel point les corps s’adaptent aux circonstances. Ce nageur sans bras ni jambes semblait tellement à l’aise dans l’eau.
Le bonheur des athlètes aussi faisait plaisir à voir ; ils avaient l’air aussi contents que les valides quand ils gagnaient une médaille.
Thierry : Les matchs de cécifoot m’ont beaucoup plu. Ces sportifs réalisent vraiment des prouesses.
Odette : J’ai suivi beaucoup de retransmissions et j’ai été très sensible à tout le courage que l’on pouvait deviner à travers les performances réalisées.
Daniel : Faire preuve de volonté et de continuité dans des conditions souvent difficiles, c’est dur.
Odile : C’était impressionnant !
Jean : A partir du moment où les gens vont au bout de leurs possibilités, ils sont gagnants.
Daniele : J’imagine les ressources morales dans lesquelles il faut puiser. Quand on est en chaise roulante et que l’on se dit que c’est pour la vie, on ne voit pas toujours d’issue. C’est une situation que j’ai failli connaitre. Dans mon cas, je me suis retrouvée en fauteuil, après 18 mois de coma. Je savais que pour retrouver l’usage de mes jambes il fallait que je fasse des efforts, sinon j’allais m’ankyloser avec le risque de ne plus jamais pouvoir marcher. J’ai pu parler à un psychologue qui m’a beaucoup aidée à dépasser mes appréhensions. Aujourd’hui, je marche avec un déambulateur et j’en suis très heureuse.
Il est important de ne pas rester seul si l’on veut réussir à dépasser ses limites, d’autant plus que certains regards font mal. Quand je me déplace avec mon déambulateur, je sens bien le manque de solidarité de certaines personnes.
Odile : Mon fils est un peu dans la même situation, mais pour des raisons très différentes : il a fait deux AVC. S’il ne marche pas suffisamment, il risque de finir dans un fauteuil. Son psychologue l’encourage à s’entretenir physiquement, mais mon fils est terrorisé à l’idée de décliner. Cette peur le paralyse, il marche de moins en moins, faute d’envie. Je n’ose pas lui en parler, mais je sais que cette situation l’inquiète.
Quand il me dit qu’il finira en fauteuil, j’essaye de la convaincre qu’il devrait envisager les choses autrement. J’espère que la situation s’arrangera. Il faut dire aussi qu’un de mes petits-fils vit très mal la situation de handicap de son père. Il est gêné de sortir avec lui, par exemple.
Viviane : Ce n’est pas la meilleure des réactions ! Ma fille aussi est handicapée à la suite d’un AVC, mais je n’ai pas honte de sortir avec elle, au contraire je suis contente quand nous allons au restaurant. Elle a deux enfants qui n’expriment pas de réticence particulière. Sa fille habite loin, mais son fils vient la voir tous les 15 jours.
Marie Claude : L’environnement est important, c’est incontestable. J’ai suivi une psychanalyse entre 23 et 27 ans, cela m’a permis de faire le ménage à l’intérieur de moi et m’a rendue plus optimiste.
Christine : Il y a des handicaps invisibles. Lorsque j’ai été internée dans un hôpital psychiatrique, ma famille m’a rejetée, aussi bien du côté de mon père que de ma mère. J’avais 28 ans, on me dirigeait vers des psychiatres qui se contentaient de me donner des médicaments. Finalement, j’aurai préféré qu’on me propose de voir des psychologues.
Pierre : Il y a beaucoup de personnes qui arrivent à dépasser leurs limites et qui ne comptent pas sur les autres pour vivre. J’ai en mémoire cet aveugle que je voulais aider à traverser la rue et qui a refusé mon aide en m’expliquant qu’il avait ses repères et que mon intervention risquait de le perturber.
J’ai aussi eu un collègue syndicaliste qui était également aveugle. Un jour il est venu me voir pour me proposer de faire visiter notre usine aux membres d’un groupe dont il faisait partie. Comme l’usine était très bruyante, nous avons organisé cette visite un dimanche. Tout était silencieux. Nos visiteurs étaient incroyablement curieux, ils touchaient à tout avec une liberté touchante.
Thierry : J’ai un cousin aveugle qui est accordeur de piano, c’est un peu un cliché mais qu’importe, quand il joue de l’orgue, c’est superbe.
Daniel : Tous ces problèmes de volonté nous concerne, nous aussi, qui avançons en âge et qui subissons davantage les effets des médicaments quand nous sommes malades. J’ai dû suivre une chimio qui a abimé mes nerfs et je dois me stimuler tous les jours pour faire un peu de marche sinon je finirai en fauteuil. Ce n’est pas facile de se motiver à mon âge, mais je me force.
Daniele : Moi, pour me stimuler, je joue au scrabble avec Jean, Christine et Marie Claude. Ça m’aide, ça maintient une dynamique.
Christine : J’ai une mauvaise mémoire, le scrabble ça me stimule.
Danièle : Je pense que les deux sont liés : le physique et le mental.
Odette : L’entourage est important mais pour parler avec quelqu’un, il faut faire confiance.
Thierry : J’ai vu un psy une fois, j’ai eu envie de me jeter dans la Seine.
Danièle : On ne fonctionne pas tous de la même manière, si je n’avais pas vu mon psychiatre, je ne serais pas là aujourd’hui pour vous parler.