Par Marie H.
Premier confinement : un avril estival succédait à un mars venteux et frais. La ville était déserte et, tous, nous rêvions de liberté et voyages.
Deuxième confinement : cette fois, comme dit le poète, c’est l’automne humide et morose. L’odeur du café et du pain grillé ne flotte plus sur le quartier, les brasseries et cafés alentour sont de nouveau fermés. Je ne descendrai pas prendre mon café matinal chez l’ami Hector, je n’allumerai pas ma première cigarette sur sa terrasse encore vide. Je nostalgise devant la fenêtre, scrutant un ciel ni gris, ni bleu, un ciel incertain et capricieux.
Ces jours-ci j’ai appris, grâce à une biographie savante et détaillée, que le sieur Adolf H, de sinistre mémoire, était végétarien, ne fumait pas, ne buvait pas et s’en vantait. Ecœurée, j’ai repris la viande rouge, la vodka et la cigarette. Je ne vivrai pas centenaire mais je n’envahirai pas la Pologne et je ne mettrai pas le monde à feu et à sang… ça peut consoler.
Histoire de m’éclaircir l’horizon, j’ouvre la fenêtre au chat du voisin. Comme chaque jour, ce greffier arrogant va faire le tour de l’appartement, bondir sur la table basse, poser un nez impertinent sur mes roses, s’installer sur le canapé en me tendant une patte impérative, avant de repartir, dédaigneux, vers la terrasse où son maître l’attend. Pas trop confiné le matou ! A l’aise dans son poil lustré ! Allons ma vieille, tu ne vas pas jalouser ce gracieux félin, un ami de longue date ? Un peu quand même. Je rêve un instant d’une réincarnation en chat de gouttière.
En attendant cette improbable métamorphose, je vais m’habiller et faire le tour du square, saluer, de loin, quelques amis et reprendre ainsi le goût de la vie.