Quincy Jones s’en est allé le 03 novembre 2024 à l’âge de 91 ans. Le trompettiste de jazz américain laisse derrière lui une œuvre immense. Et beaucoup de nostalgie chez Michelle. Premier épisode.
Par Michelle Fourre.
La disparition du trompettiste Quincy Jones m’a beaucoup émue. Le Gospel, la Soul et surtout le Jazz ont fait partie de mes préférences musicales tout au long de ma vie. Et Quincy Jones était l’une de mes idoles.
Qui était Quincy Jones ? Il est né en 1933 dans la banlieue sud de Chicago (Illinois), pendant la grande dépression américaine. Il a connu une enfance difficile marquée par la pauvreté entre une mère à la santé fragile et instable et un père accaparé par son travail sur les chantiers navals. Lui et son frère, livrés à eux-mêmes, ont grandi dans la rue, aux côtés des voyous et des gangsters. Vers 10 ans, Quincy découvre par hasard – sur les chantiers de son père ? – des instruments de musique. C’est le piano qui l’attire pour commencer. Il apprend à en jouer, tout seul. Vers 13 ans, après avoir testé plusieurs instruments à vent, il s’initie, également tout seul, à la trompette. Cet instrument l’emballe. Quincy réalise en en jouant qu’il se sent libre. Il conçoit alors le rêve de « devenir un Noir distingué et fier ».
Plus tard, à force de travail, il réussit à se faire engager dans un petit orchestre et reçoit ses premières leçons de trompette d’un jazzman qui l’aide à parfaire l’utilisation de son instrument. Quincy, (c’est ainsi que tous l’appellent), ira par la suite d’orchestre en orchestre.
Travaillant le jour au collège et la nuit dans les bars comme jazzman, il est reconnu comme un jeune espoir du jazz et un brillant élève au collège. Il reçoit une bourse d’étude et entre dans une école pour étudier la musique à Boston. Le cadre scolaire ne lui convenant pas, il quitte l’établissement pour entamer sa carrière de trompettiste de jazz et arrangeur musical.
C’est à cette époque qu’il fait la connaissance de Ray Charles de deux ans son aîné.
Qui était Ray Charles ? Né en 1930 à Albany dans l’état de Géorgie, Ray a également connu une enfance difficile. A la pauvreté s’est ajouté une maladie oculaire détectée à l’âge de quatre ans, qui l’a rendu aveugle à sept ans. Sa mère aimante le fera entrer dans une école spécialisée pour les jeunes aveugles en Floride, où il étudiera la musique. Il est doué et devient pianiste, vocaliste, arrangeur musical, artiste d’enregistrement, musicien de jazz, auteur-compositeur-interprète.
Quincy, le trompettiste et Ray, le pianiste chanteur compositeur partagent la même passion de la musique. Dès leur rencontre, ils se lient d’une véritable amitié qui durera plusieurs décennies. Quincy appellera toujours Ray « son grand frère ».
A ses débuts de musicien professionnel, Quincy Jones effectue une tournée en Europe pendant quatre ans avec Lionel Hampton. A son retour, il s’installe à New York où il se lance en tant qu’arrangeur musical indépendant pour des artistes comme Ray Charles, Dinah Washington… Mais il est confronté aux interdits raciaux qui sévissent encore en Amérique : jouant de la trompette, il ne peut être arrangeur que pour un instrument à vent.
En 1957, il décide de revenir en France pour s’inscrire aux cours de musique de Nadia Boulanger, une pianiste de musique classique réputée. Elle est en effet professeure de musique universitaire, professeure au Conservatoire National Supérieur de musique à Paris et aussi pianiste cheffe de chœur, cheffe d’orchestre, compositrice… Elle offre des cours gratuits aux élèves qu’elle détecte comme sortant de l’ordinaire, c’est le cas de Quincy Jones. D’autres artistes suivent également ses cours comme Michel Legrand, Georges Gershwin pour ne nommer que ceux-là…. Elle disait « qu’avant de proposer sa propre musique, il fallait apprendre à déconstruire celle des autres afin de mieux s’en emparer ».
Au terme de son cycle d’étude en France, Quincy revient en Amérique. Il n’oubliera jamais les propos tenus par sa professeure de musique parisienne qu’il va toujours considérer comme son mentor : « Il n’existe que douze notes et tant qu’il n’en y aura pas de treizième, apprends tout ce que tu peux savoir quant à ce que les autres ont fait de ces douze notes ». Il avouera plus tard que « c’est exactement ce qu’il a toujours fait ».
A vingt- cinq ans, Quincy Jones que tous appellent Q, s’intéresse à tous les domaines de la musique et à tous les musiciens, quel que soit leur âge. Il répond toujours avec générosité, dispense des conseils et reste à leur écoute. Il s’initie au Bebop, à la Pop, au Rap, au Hip-hop. C’est un travailleur acharné comme son père, auquel il se réfère souvent, et parle des nouveaux genres musicaux comme de musiques sociologiques.
Avec le temps, Quincy Jones, insatiable touche à tout, devient un chef d’orchestre trompettiste, arrangeur musical producteur de télévision, chanteur, musicien de jazz, compositeur, réalisateur, et producteur de cinéma. Rien que cela ! Il est reconnu par les plus grands et apportera aide et conseils à Count Basie, Ella Fitzgerald, Frank Sinatra – qui l’aimera comme un frère -, Stevie Wonder, … Vers 1974, il travaillera avec Michael Jackson et produira avec lui les albums tels que Off the Wall, Thriller et Bad et ils rapporteront à tous deux un succès mondial. Cette reconnaissance ne l’a pas empêché de donner des concerts caritatifs. Ni d’apporter son aide aux jeunes artistes. Il leur rappelait « qu’il fallait toujours rester humble avec la créativité et gracieux avec son succès » et ajoutait aussi que la « musique était une arme pour toucher les gens ».
Son talent, lui a en tout cas permis de dépasser les frontières raciales.
Quincy a écrit 2900 chansons réparties sur 300 albums, et 1000 compositions pour 51 longs-métrages et séries dans l’industrie du cinéma.
Il a reçu de nombreuses distinctions dont 28 Grammy Awards (récompenses de l’excellence de l’industrie musicale américaine), 7 Oscars (récompenses cinématographiques américaines destinées à saluer l’excellence des productions internationales du cinéma), et 4 Golden Globe Awards (récompenses de cinéma et télévision américaines), ainsi que de nombreux honneurs pour ses œuvres humanitaires…
L’héritage musical de Quincy est immense. Aux Etats-Unis, il y a eu « The King » avec Elvis Presley, « The Genius » avec Ray Charles, peut-on parler de « The Giant » avec Quincy Jones ?
Voici une liste de ses plus grands succès :
*1962 : Soul Bossa Nova, morceau instrumental populaire joué et produit par Quincy Jones
* 1964 : Fly me to the moon, chanté par Kran et orchestre par Quincy, Sinatra
* 1973 : Angel par Quincy etc chanté par Aretha Franklin
* 1979 : Don’t stop `til you get enough, chanté par Mickel Jackson et produit par Quincy
*1981 : Just once, chanté par James Ingram et produite par Quincy
* 1982 : Thriller, chanté par Michael Jackson et produit par Quincy
* 1985 : We are the world, écrite par Michael Jakson et Lionel Richie réalisée par Quincy Jones et Michael Omartian pour lutter contre la famine en Afrique
*1989 : I’ll be good to you, de Quincy et chanté avec la participation de Ray Charles et Chaka Khan